[2019] This black page in history is not colourfast, will stain the next [Miles]

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Lang Zi a dit « les corvées à la noix, toujours pour Bibi seront ! ». Encore une fois, son descendant pouvait se rendre compte de toute la véracité profonde des paroles du vieux sage. Beau à en pleurer, ou pas. En attendant, Lang devait se rendre au commissariat. On lui avait demandé de retirer une preuve d’une vieille enquête résolue depuis longtemps. Pourquoi ça avait pris tant de temps ? Vous ne connaissez pas l’administration vous, hein ? Bande de veinards…

L’homme s’était préparé psychologiquement à cette épreuve : méthode de méditation Zhang Faienne en tournant sur son siège de bureau comme un gosse + manger un chocolat avant de partir, histoire de se donner du courage. Il en mangerait un autre en rentrant, ou bien toute la boîte selon les complications rencontrées. Vous savez pourquoi ? Parce que les caricatures de policiers ne sont pas des caricatures. A croire que le mot « incompétence » avait été inventé pour eux.
Un autre que lui aurait envoyé un de ses hommes, c’est ce qu’il aurait également fait il y a un an ou même quelques semaines. Là il pouvait pas. Une mise à l’épreuve, Lang le savait. On voulait qu’il y aille de lui-même, sur ses propres petites pattes d’expatrié asiatique. En gros, cette petite « mission » qu’on lui confiait, c’était tout simplement pour lui beugler de manière TRES subtile dans les esgourdes « Tu ne peux pas faire confiance à tes employés alors bouge toi le derrière TOI-MEME ».
Et le pire, c’est qu’ils avaient raison. De ce côté-là, mieux valait se la fermer pour le moment. Tout vient à point à qui sait attendre (de Lang Zi de la Fontaine, celle là). Un jour cette affaire se tassera et il pourra de nouveau relâcher lui-même les rênes envers ses gars.
De lui-même, il était devenu plus dur envers eux. A vrai dire, son comportement oscillait entre la tyrannie et ce mélange de confiance ainsi que d’autorité qu’il avait toujours eu. Personne ne disait rien dans les rangs, ça devait être ça le pire : ils comprenaient. En acceptant ce fait sans se plaindre, en acceptant de parfois être traités comme des chiens, ses hommes essayaient de prendre sur leurs propres épaules, un peu de cette charge qu’il portait. Et Lang ne pouvait pas les en remercier. Parce que sa confiance à présent, hé bien il devait la garder pour lui-même, bien au fond de son sac avec son mouchoir par-dessus comme on dit.

A l’intérieur du bâtiment, régnait un brouhaha qui promettait de fameuses migraines. Une odeur de café froid et de donuts le prit aux narines. Son estomac fit un joli looping avec salto arrière avant de se remettre bien sagement en place. Moment de folie on va dire… Quelques personnes relevèrent la tête à son approche mais nul ne l’apostropha. Derrière un bureau, un homme boutonneux tapait avec difficulté à la machine. Lang se demanda un instant s’il était capable d’y voir quelque chose avec cette barrière de cheveux gras lui barrant le visage. Les jeunes sont pleins de ressources, comme on dit.
En attendant, il manquait quelque chose à cette faune pittoresque : un gorille.
Non pas que le loup se soucie du primate, mais c’était assez inhabituel d’entrer sans se faire grogner dessus jusqu’à ce que l’inspecteur se rende compte de sa bourde. Amen.

Calmement, Lang présenta la raison de sa visite, avec papiers officiels et tout et tout. Sésame ouvre toi et puis voilà. Le soleil tapait sur les vitres, mais la poussière et la crasse accumulée dessus donnaient une atmosphère triste et glauque aux pièces qu’il traversait. Dans des lieux publics, le ménage est toujours fait de manière sommaire.
Le policier devant lui, lui ouvrit la porte de la salle des preuves et…partit. Ca, en zang fhaien on appelait ça du « laisser-aller ». Mais l’homme n’en était plus à ça près concernant le système judiciaire et policier de ce pays. AU contraire, c’était bien ça lui permettait de grogner. Et grogner ça empêche de réfléchir. On réfléchit souvent lorsque l’on est dans la situation de Lang. Ce n’est pas un problème en soi, le problème c’est de le faire seul lorsqu’avant on le faisait à deux.

Dans cette salle ci, il n’y avait pas de fenêtre. L’homme tira sur la petite cordelette attachée à la lampe. L’ampoule grésilla quelques instants avant de s’allumer. Jaune pisseux, il y a mieux comme lumière pour travailler non ? En même temps, Lang n’avait pas à rester des heures ici. Ses yeux firent rapidement défiler les petites étiquettes tachetées de moisissures qui révélaient les noms des enquêtes. Evidemment, le carton qu’il cherchait était tout en bas.
L’asiatique s’accroupit, faisant douloureusement craquer ses genoux. Il eut une prière pour son dos, lui demandant de ne pas lâcher et de continuer à l’assister dans ce dur combat qu’était la vie. Son dos lui obéit.
Le couvercle de la boîte fut enlevé : des papiers, quelques photos et un sachet en plastique. C’était ça ce qu’il cherchait : le contenu du sachet. Juste un jouet, une tortue en plastique ayant appartenu au tueur. Il l’avait appelé Frankie. Pour les enquêteurs, ce jouet possédait un lien direct avec la psyché du coupable, mais jamais ils n’avaient pu décider à quel point.
Lang leva le sachet à la hauteur de son nez, Frankie lui lança un regard qui –il y a quelques années- aurait été bienveillant, avec ses yeux en gommettes. Mais là, les gommettes s’effaçaient. Le sourire aussi, alors au final il ne restait rien de plus qu’un rictus moqueur. Une connerie de jouet d’à peine une vingtaine de centimètres.

Vite fait, ça fut embarqué dans sa mallette. Il aurait pu repartir tout de suite après avoir tout remis en place mais…il ne le fit pas. L’évidence lui sauta aux yeux, s’inscrivant au fer rouge dans son cerveau : il y avait des affaires A ELLE dans cette pièce. Personne n’en saurait rien si jamais il…il…il en prenait.
Sauf que Lang était un homme intègre et surtout, qu’il devait l’oublier. C’est pire qu’un chagrin d’amour, parce que c’est pas un chagrin d’amour. Pour une rupture, quelqu’un peut facilement remplacer la volage. Là, la place était vide et le resterait. Tout de suite après l’avoir, ses supérieurs l’avaient forcé à consulter un psy. Evidemment l’homme n’avait rien su dire.
Et de ce fait, rien su soigner.

Une mouche vola près de l’ampoule du plafonnier. Son bourdonnement remplissait la pièce. Lang fit de nouveau un pas vers les cartons. Oui, il pouvait… Mais il ne le ferait pas. Quel souvenir aurait-il pu prendre, hein ? Ses doigts se posèrent sur la boîte qui l’hypnotisait tant. Aussitôt, la poussière vint s’y coller. He ben, parfait pour les empreintes tout ça. Que faire maintenant : ouvrir pour jeter un œil ? Non, encore une fois : non. Simplement non.

Un bruit de pas…

Alors quelqu’un allait le surprendre dans cette position ? L’homme se redressa à nouveau. Cependant, il était encore incapable de détacher ses yeux de… de là. Il ne vit pas la personne qui entrait. Il ne le voulait pas.

Et là, dans la mallette, depuis le sachet en plastique qui lui servait de tombeau, Frankie la tortue riait à en perdre haleine.

Un rire trop familier.

Ce n'était qu'une photo. Une simple, une banale photo. Une des rares qu'il possédait, et qu'il n'avait d'ailleurs pas voulu avoir. Au début. Elle était mal cadrée. Très mal cadrée. Un peu floue aussi. Parce que la personne qui avait appuyé sur le déclencheur était un des sujets apparaissant sur l'image et qui, de fait, avait dû tendre le plus possible son maigre bras pour réussir à capturer dans l'objectif ce qu'elle désirait. Elle avait réussit. Elle s'était prise, affichant un énorme sourire, radieux, plein de joie et d'excitation. De l'autre coté du cadre, il y avait cet homme, toujours aussi ballaud et empoté, qui affichait le même genre d'expression. Et au milieu, rentre ces deux surexcités, il y avait lui. Lui qui ne souriait pas, qui ne regardait pas l'objectif. Il la regardait Elle, avec un regard réprobateur, celui qu'il savait si bien faire. Le seul regard qu'il savait bien faire sur commande en vérité. Il râlait, pour la forme. Pourtant, au fond de lui, il savait très bien que le jour où ce cliché avait été prit, il avait été aussi soulagé et heureux que les autres. Tout au fond.
Seulement, il ne le montrait pas.

Miles Edgeworth ne montrait jamais ses sentiments. Ou du moins pas les sentiments de « faible » comme le lui avait apprit Von Karma. Cela ne servait à rien de montrer que l'on est joyeux, rassuré, fier ou aimant. Cela ne servait à rien. Juste à se faire des amis. Et les amis aussi étaient inutiles. N'est-ce pas ?
Et pourtant.

Le procureur couva l'image sur papier glacée d'un regard neutre. Assez de se tourmenter, ce n'était pas le moment. Il avait du travail que diable ! Il sortit son portefeuille de sa veste et y glissa la photographie, avec l'unique autre cliché qu'il acceptait de garder parmi ses effets personnels. Plus vieille, elle ne montrait pas seulement trois personnes mais un groupe plus important. Et sur celle-ci, il souriait vraiment. Il se trouvait d'ailleurs gauche là-dessus. Une raison de ne plus y penser.
Ce n'était qu'une photo, au final.

D'un coup sec, il coupa le contact de sa voiture et s'en extirpa rapidement. Oui, il roulait toujours dans sa belle voiture de sport rouge (assortie à la tenue s'il vous plait) pendant que d'autres comme Gumshoe n'avaient même pas de quoi louer une trottinette. Et non il n'en avait pas honte, et s'en fichait même un peu comme de son premier jabot à vrai dire.

Rapidement, il parcourut les quelques mètres qui séparaient le parking des locaux du département de police. Cette ménagerie... Moins il y mettait les pieds, mieux il se sentait. Rien à voir avec le silence qui dormait habituellement dans les couloirs menant aux bureaux des procureurs. Et effectivement, dés que les portes automatiques le laissèrent entrer, ce fut un tonnerre de sons en tout genre. Des ordres beuglés par-ci et des bruits de déchiqueteuses par-là. Voilà, à chaque fois qu'il se trouvait en ces lieux, Miles savait qu'il avait choisit la bonne voie. Le bon coté des serviteurs de la Justice. Courir partout à la moindre alerte et finalement se retrouver avec un salaire toujours de plus en plus insignifiants, c'était bon pour les bonnes pâtes. ...Pour ceux comme Dick Gumshoe oui.
...Au secours, ne venait-il pas de faire deux remarques à propos de ce détective épuisant en moins de dix minutes ? Voilà qu'il osait même le harceler de son incapacité à travers ses propres pensées. Peut-être avait-il besoin de vacances.

On voulu l'accompagner à la salle des preuves. Pourquoi faire ? C'était ce qu'il s'était contenter de dire. Oui, pourquoi faire ? Il connaissait l'endroit, les trois quarts des policiers et des gardes le connaissait aussi, au moins pour avoir vu ne serait-ce qu'une fois sa tête dans les journaux. A moins que ceux-ci n'ai jamais vu de lui que l'article de l'affaire dans laquelle il avait été incarcéré comme principal suspect, on le laisserait passer. Et puis, il n'en avait pas pour longtemps. Il se contenterait de ramasser un dossier en rapport avec l'enquête qu'il suivait en ce moment. Une sombre histoire. Celle d'un homme qui n'était que la main exécutrice d'un autre. Un tueur sous influence d'un manipulateur. Un manipulateur qui avait reçut le nom de Frankie par les enquêteurs. Question de pratique. Il fait toujours meilleur impression d'avoir un prénom tangible à noter sur les documents administratifs. C'est mieux vu par les juges que « Monsieur X » ou « Le manipulateur » voyez-vous. Et ça avait le mérite de réconforter un peu ceux qui le traquait. Non, ils ne cherchaient pas un fantôme, mais bel et bien un homme surnommé Frankie. Simplement.
Devant ses arguments, on le laissa effectivement faire. Ses yeux s'ouvrirent légèrement sous la surprise de trouver la lumière de la pièce allumée, laissant tomber un éclat blafard sur la poussière ayant élue domicile un peu partout. En face de lui, une silhouette. Grande. Qu'il serait déjà capable de reconnaître entre mille. Comment oublier cette coiffure surréaliste de toute façon ?

Dans son dos, la lourde porte grinça, avant de finalement se refermer dans un cliquetis de sécurité. L'écho se répercutant semblait narguer Miles, comme pour lui faire croire qu'il n'y avait plus de sortie ou de retour possible. Pour le forcer à se sentir acculé. Faux, faux et faux, bien sur. Mais l'atmosphère opaque de la pièce contribuait à cet effet. Le procureur hésita un instant, n'osant bouger, avant de finalement s'avancer jusqu'à l'homme qui restait aussi immobile qu'une statut de marbre. Ou qu'un Blue Badger n'ayant plus de batterie. Peut-être n'était pas un homme en fait, mais bien un de ces pauvres lutins n'ayant que pour seul choix de danser encore et encore jusqu'à ne plus avoir de piles ?

Ou pas. Au fur et à mesure qu'il s'approchait, le doute était de moins en moins permis. Le procureur s'arrêta devant la boite de l'affaire qui l'intéressait, juste à coté de Lang qui n'avait toujours pas bougé, qui ne daignait pas le regarder.

- J'ignorais qu'Interpol avait encore à faire ici.

Il fit semblant de ne pas remarquer le carton devant lequel le Zang-Faïen restait immobile. Comme hypnotisé. Non, Miles ne devait surtout pas reconnaître ce carton. Il se força à ne voir que les pièces à conviction de son affaire à lui.

- ...Je vous croyais déjà rentré dans votre pays.

Ne pas savoir quoi dire, ne pas savoir quoi penser, ne pas savoir quoi faire.
Juste combler le vide par des mots.
Essayer.

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Pretty Boy…

Parce qu’il en est ainsi, parce qu’un loup aura toujours dans son regard le reflet d’une lune inatteignable, Lang s’accorda encore quelques instants à regarder le carton en laissant des «et si.. » résonner dans sa tête.
La voix de Miles le ramenait sur terre, il se retourna pour lui faire face, son éternel rictus au coin des lèvres. Son pays ? Il avait plus de pays, plus maintenant. C’était ça les sentiments de Lang, mais il les disait pas. Pas la peine, hein…

Interpol m’a mis sur la sellette… j’ai comme qui dirait, une jolie laisse autour du cou. On veut vérifier si je sais faire autre chose que d’engager des criminels à mon service.

Une laisse avec un collier étrangleur, l’homme se sentait suffoquer. Il pensa à Lang Zi, à tout ce qu’il avait put dire ou écrire, capable de le guider. Mieux vaut être une tortue vivante, traînant sa queue dans les chemins boueux, qu’une tortue morte dans une cassette d’ivoire. La gloire était une belle chose, mais l’humilité si cela permettait la vie, valait également son pesant de grains de riz d’après le vieux sage…

« Arrêtez le mal avant qu'il n'existe; calmez le désordre avant qu'il n'éclate. », Mieux vaut agir tout de suite avant que je ne devienne hors de contrôle et dangereux. Bah… Du coup on m’a mis sur l’affaire « Frankie »

Le sac plastique avec la tortue fut levé pour le présenter au visage du procureur. Une sale affaire qui se devait d’être résolue rapidement pour éviter une panique générale. Un truc super méga trop bien pour se casser les dents, quoi.
Il s’avança un peu plus vers Miles, s’arrachant enfin à l’attraction de…. Du carton. Edgeworth, c’était pas le genre de cas à qui l’ont dit « bonjour, ça va depuis le temps ? ». Monsieur se pensait sûrement au dessus de tout ça et aurait tôt fait d vous fusiller du regard comme le vil faquin que vous êtes.

La Sister va bien ? Je suis pas avec elle sur cette affaire, ça doit lui faire des vacances…

C’était quoi cette foutue gêne entre eu là, d’un coup ?! C’était parce que la mioche était pas là, ainsi que le détective. Ils avaient personne d’autre qu’eux même pour faire semblant d’être hyper heureux, que tout allait bien, ça y est c’est la joie sur terre, cui cui cui.
Mais ils arrivaient pas à se cacher grand-chose en fait, alors ça marchait pas, et Lang se sentait mal, extrêmement mal. Quant à dire ce que ressentait Edgeworth, hé bien demandez lui vous-même.
.
Ils étaient côtes à côtes, si près, tellement près… et la nature humaine est ainsi faite qu’il y aurait eu des milliers de gestes à avoir l’un pour l’autre. Une main sur une épaule, un regard, un sourire, quelque chose… Il y aurait pu avoir une étreinte, un abandon. Ce n’était pas là affaire d’amour, c’était affaire de survie.
Parce que le loup en Lang hurlait pour une lune qui n’existait plus, parce qu’on l’avait séparé du reste de sa meute, qu’on le brisait.
Le loup solitaire se fait dévorer par l’hiver, il n’y a que la meute pour survivre.
Que la meute…

Penser à autre chose. Penser à un cadavre, à un corps retrouvé en bordure de routes, les yeux arrachés. Un meurtre brutal, maladroit… et des mégots de cigarettes à côté du corps. Les cigarettes de Frankie, parce que cette ordure avait regardé pendant que ce qui était sûrement son nouveau « poulain », agissait.

De l’autre côté de la porte leur parvenait de temps à autres les bruits du commissariat. Certains agents s’invectivaient joyeusement, le bruit de pas, le bruit de touches d’ordinateur. Ca paraissait irréel, factice.
Ca lui sauta à la gorge comme une envie de vomir. Il était pas à sa place ici, il le serait jamais.

Lang voulait rentrer chez lui.

Mais c’était où ça ? Crétin, dans ton pays évidemment … Ton pays qui se reconstruit, mais ça prend du temps, ça prend du temps et ça sera jamais comme avant. Cet avant que t’as pas connu et dont t’arrêtes pas de parler. Parfois faudrait mieux que tu te taises, idiot…

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